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De Menton à Briançon, la frontière franco-italienne sous tension face à l'afflux migratoire

Trois semaines après le débarquement de milliers de personnes en quelques jours à Lampedusa, les contrôles se multiplient pour tenter de gérer la vague migratoire à la frontière franco-italienne, des Alpes-Maritimes jusqu'aux Hautes-Alpes.

Trois semaines après le débarquement d'environ 8.500 personnes en quelques jours à Lampedusa, la France fait face à un afflux massif de personnes exilées. Malgré les contrôles et les renforts policiers, la situation reste très tendue à la frontière franco-italienne, des Alpes-Maritimes jusqu'aux Hautes-Alpes.

À Menton, à quelques mètres de l'Italie, la gendarmerie multiplie les contrôles routiers. 200 policiers supplémentaires en plus des effectifs déjà existants sont arrivés sur place, un dispositif impressionnant qui fonctionne 24h/24 sur plusieurs points de contrôle.

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Beaucoup de migrants tentent de se faufiler dans les camions pour atteindre l'Hexagone, les contrôles ont donc été intensifiés. Une mesure très bien accueillie par les chauffeurs routiers.

"Je pense que c'est une bonne chose, confie un chauffeur anglais. Ça m'évite des problèmes quand j'arrive à Calais."

Même état d'esprit du côté de ce routier espagnol. "Pendant la nuit, quand je suis en train de dormir, ils ouvrent la porte et ils se mettent à l'intérieur. C'est dangereux pour le conducteur."

D'autres optent pour le train et tentent de rejoindre Nice par la gare de Vintimille. C'est ce qu'ont tenté deux migrants, avant d'être arrêtés par les autorités. "Je viens d'Iran, je suis passé par la Turquie puis j'ai pris le bateau pendant cinq jours. Je veux aller en Angleterre ou en Allemagne", raconte Muhammed.

"Je voulais seulement faire du passage, pour aller en Espagne. Il y a mon oncle là-bas, je voulais lui rendre visite", explique à son tour Ousmane, originaire de Guinée.

Briançon dans l'urgence

Enfin, certains choisissent de faire la route à pied. Beaucoup de migrants en provenance de Turin empruntent ainsi les chemins cachés de montagne et arrivent dans les Hautes-Alpes. Dans ce département, les associations tirent aussi la sonnette d'alarme. L'heure est à l'urgence.

Si les contrôles ont également été renforcés, Briançon, à 12 kilomètres de la frontière, accueille encore aujourd'hui entre 100 et 150 personnes chaque jour. Une situation qui dure depuis le printemps dernier.

Les associations locales n'ont plus les moyens de prendre en charge correctement tous les exilés. Cet été, elles ont dû prendre en charge plus de 300 personnes. Débordée, la structure locale des Terrasses Solidaires, a du fermer à la fin de la saison car les mesures de sécurité n'étaient plus réunies.

Malgré tout, elle continue de servir des repas aux exilés. "Ce sont majoritairement des hommes seuls", décrit Jean Gaboriau, administrateur de l'association Refuges Solidaires. "Après, il y a des mamans avec des enfants."

Des routes de plus en plus dangereuses

De son côté, la mairie de Briançon refuse d'ouvrir un autre centre d'accueil d'urgence pour migrants. "Nous n'avons ni les infrastructures ni les moyens humains pour gérer cette situation", dénonce Arnaud Murgia sur BFMTV.

"On a un problème qui est de nature européenne. Si on n'a pas d'accord entre l'Italie et la France, on n'arrivera pas à gérer cette situation."

L'édile explique également sur BFMTV que la commune vit au rythme de ces pics d'afflux migratoire. La plus grande a été observée au mois d'août. "Ça s'est relativement calmé depuis une semaine dès lors que les renforts annoncés par le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin sont arrivés sur place. Ça a fait tout de même baisser la pression même si la situation reste très difficile."

Arnaud Murgia espère notamment que les renforts de l'État seront pérennes, car le phénomène est selon lui récurrent. "Il y a eu des pics, note le maire briançonnais. On est passé de 50 mineurs non-accompagnés à plus de 150 en août."

"On a du mal à comprendre pourquoi cette route migratoire passe par chez nous car c'est une route qui est dangereuse [...] il faut tout faire pour leur déconseiller de passer par ici", alerte l'élu.

En effet, pour atteindre la commune située en altitude dans les montagnes, les exilés prennent le plus souvent des petits chemins de randonnée, qui vont bientôt s'enneiger sous des températures négatives.

"Quand on vient de passer la montagne, à pied, de nuit, et qu'on arrive à Briançon en ayant la peur au ventre parce qu'on sait pas si on va se faire coincer ou pas par la police, on est bien content trouver un endroit tranquille qui accueille", insiste le responsable du refuge solidaire Jean Gaboriau.

Malgré cela, la plupart n'abandonne pas. Certains laissent même leurs couvertures ou certains vêtements derrière eux, ont confié des riverains à BFMTV, afin de passer le plus inaperçu possible et pouvoir continuer leur route vers la Grande-Bretagne.

Ce mercredi, les 27 pays de l'Union européenne se sont mis d'accord sur une réforme migratoire. Elle prévoit notamment une répartition solidaire et obligatoire en cas d'afflux de migrants dans l'un des pays membres.

Alizé Boissin et Benoît Ruiz avec Juliette Moreau Alvarez